- Jean-Luc Loyer -
- pourquoi??
Empruntée plusieurs fois à la bibliothèque, rendue plusieurs fois sans l'avoir lue, par manque de temps, de motivation, et puis cette fois, ce fut la bonne!
- le pitch de moi personnellement:
Mars 1906, à Courrières, dans le Nord de la France.
Le charbon est l'un des grands enjeux économiques de la France de l'époque. Des milliers d'hommes et d'enfants descendent "au fond", dans les mines. Des milliers de familles vivent du peu que rapporte cette activité si dangereuse. Grisou, silicose, poussières, incendies, éboulements, le danger est partout et constant. Les ouvriers, tout en tentant d'obtenir des avancées salariales et sociales préviennent les patrons de la dangerosité de l'état des galeries. Ces derniers font la sourde oreille malgré les menaces de grèves.
La catastrophe de Courrières arrive le 10 Mars 1906, entre 6h30 et 6h40.
La plus grande catastrophe minière de tous les temps. 1099 morts...
A ce jour, on ne sait toujours pas ce qui a provoqué ce drame, et la compagnie de Courrières a été dégagée de toute responsabilité par un non-lieu prononcé par le tribunal de Béthunes en Juillet 1906...
- bien? pas bien? l'avis de moi en personne:
Il m'aura fallu du temps pour me lancer dans cette lecture, sans doute pour mieux la découvrir. Et quelle découverte!
Jamais je n'avais entendu parler de cette catastrophe pourtant historique et j'ai vécu cette lecture comme une véritable plongée, sous de nombreux aspects.
Une plongée dans les mines tout d'abord. Car si l'on imagine plutôt bien les conditions de travail difficiles de ces hommes, on est malgré tout loin du compte!
Ici l'ambiance est vraiment pesante, tant à la surface qu'au fond.
Les couleurs utilisées par l'auteur, le noir, le blanc et un peu de marron orientent toute l'attention du lecteur vers le récit, extrêmement précis.
L'histoire est découpée en plusieurs chapitres retraçant pas à pas la chronologie des événements. Cette façon de construire l'album lui apporte toute la solennité et la tension qu'il mérite.
Plongée dans l'Histoire aussi...
Le début de l'album précède le drame. On sait déjà que l'accident va avoir lieu, la tension est donc déjà présente lors de la présentation du contexte politique et social.
Quelques personnages sont mis en avant, et insistance est faite sur la jeunesse des "galibots" comme étaient appelés les enfants apprentis mineurs.
L'inquiétude des femmes, la présence d'autres enfants, des conditions de vie parfois précaires, des pères inquiets pour leurs fils, essayant de les avoir dans leur équipe ou les confiant à "quelqu'un de bien".
L'histoire commence, très précise, on sent que l'auteur est bien documenté.
Les objets, outils, sont appelés par leur nom précis. Les expressions des gens du Nord sont utilisées, le langage respecté, les discours politiques retranscrits.
Les pages se tournent, la catastrophe approche, puis arrive. Les dessins sont durs et parfois détaillés, le texte se fait plus rare, les images parlent d'elles mêmes et le silence se fait, jusque dans les pages.
Puis, plusieurs pages glacent le lecteur, le clouent sur place, aiguise encore sa conscience, si besoin est... Ces pages sont la très longue liste nominative des hommes morts dans l'accident. Nom, prénom, âge... Il suffit de laisser ses yeux courir sur cet hommage pour voir apparaître de nombreux "14 ans", "15 ans", "16 ans"...
1099 morts, dont 242 enfants...
Les instants qui suivent la catastrophe dans la mine sont rapportés, presque à la seconde. La panique, l'effroi, la peur, l'espoir, l'organisation, la solidarité, et la mort... la mort, partout...
A la surface aussi il se passe des choses. L'auteur nous sort du charnier pour nous faire remonter à l'air libre, un air tout aussi vicié qui n'apportera que le malheur, le deuil, l'organisation des funérailles, des recherches, et les réactions des différents responsables.
Une véritable lecture coup de poing! Il m'a fallu m'arrêter par moments pour reprendre ma respiration, tenter de sortir de l'espèce de torpeur dans laquelle me glissaient ces images, et surtout ces mots...
Jean-Luc Loyer livre ici un documentaire très complet, très précis, et très précieux. Une analyse du drame, de l'avant, de l'après, des conséquences politiques, économiques, et sociales d'un événement dramatique important qu'il faut faire connaître ou ne pas oublier.
C'est aussi un très bel hommage à tous ces hommes et à leurs familles.
- merci qui?? une p'tite anecdote?:
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chez Mango!!
- lasardine -
Commentaires
la-ronde-des-post-it (lasardine) le 20-05-2014 à 12:09:37 # (site)
@ FaBI: ha oui!! brrrr, brrr, et re brrrr
@ Noukette: c'est clair! effarants!
@ OliV: je le relirai aussi très certainement un jour!
@ Mokamilla: tu ne seras pas déçue par le coup de poing crois moi!
Mokamilla le 14-05-2014 à 17:44:37 # (site)
"Lecture coup de poing", déjà, ça me parle ! Merci
OliV le 14-05-2014 à 16:17:30 # (site)
J'en garde un bon souvenir de lecture, très poignante. Je l'avais lu assez rapidement après sa sortie, et à ta lecture, tu me redonne envie de la lire, malgré cet aspect catastrophe...
Noukette le 14-05-2014 à 13:55:42 # (site)
Les chiffres sont effarants je dois dire !!
la-ronde-des-post-it (fabi) le 14-05-2014 à 12:27:32 # (site)
Brrrrrr....